CEDH : condamnation pour diffamation de Patrick de Carolis et d’une journaliste de France 3

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La chaîne de télévision France 3 a diffusé une émission intitulée « 11 septembre 2001, le dossier d’accusation », s’interrogeant sur l’absence de procès cinq ans après les faits.
Le prince Turki Al Faysal Bin Abdulaziz Al Saoud (« prince Turki Al Faysal ») a été interrogé dans le reportage.
Des proches des victimes l’accusaient d’avoir aidé et financé les talibans lorsqu’il exerçait les fonctions de chef des services secrets en Arabie Saoudite.

Le prince a alors fait citer Patrick de Carolis, le directeur de la chaîne de télévision France 3, la journaliste du reportage ainsi que la société France 3 devant le tribunal correctionnel de Paris pour diffamation.
Patrick de Carolis et la journaliste ont été déclarés coupables de diffamation publique envers un particulier, le prince Turki Al Faysal, constitué partie civile.
Le tribunal a déclaré la société France 3 civilement responsable.
Les juges ont considéré que certains des propos reprochaient au prince d’avoir soutenu matériellement et financièrement Al-Qaïda, à une date à laquelle les intentions et les projets terroristes de cette organisation n’étaient plus douteux, de sorte que sa responsabilité personnelle se serait trouvée engagée dans les attentats du 11 septembre 2001.
La cour d’appel de Paris a confirmé ce jugement. Selon les juges du fond, la journaliste aurait dû faire preuve de prudence et d’objectivité puisqu’elle relatait des accusations extrêmement graves qui n’avaient pas encore été examinées par un tribunal.
Le 10 novembre 2009, la Cour de cassation a validé l’arrêt d’appel.

Patrick de Carolis et la société France 3 ont alors saisi la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH).
Ils allèguent une violation de leur droit à la liberté d’expression.

Le 21 janvier 2016, la CEDH dit qu’il y a eu violation de l’article 10 (liberté d’expression) de la Convention européenne des droits de l’homme.
La CEDH estime, après examen détaillé, que la manière dont le sujet a été traité n’était pas contraire aux normes d’un journalisme responsable.
Pour ce qui est des peines prononcées, la Cour estime que la condamnation de Patrick de Carolis à une amende pénale et la déclaration par les tribunaux que France 3 était civilement responsable, s’analysent en une ingérence disproportionnée dans le droit à la liberté d’expression des intéressés, laquelle n’était pas nécessaire dans une société démocratique.