CEDH : convention de gestation pour le compte d’autrui conclue à l’étranger par un Français

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Les deux affaires concernent chacune des enfants nés en Inde, d’une mère indienne et d’un père français qui figurent tous les deux, en qualité de mère et de père sur l’acte de naissance délivré en 2009 et 2010 par l’administration indienne. 
Les pères avaient effectué une reconnaissance de paternité dans une mairie française, avant d’assigner le procureur de la République de Nantes devant un tribunal de grande instance afin d’obtenir la transcription de l’acte de naissance sur les registres de l’état civil, suite aux refus. 

La Cour de cassation a refusé la transcription dans les deux affaires, estimant qu’en l’absence de projet commun tant de vie de couple que de suivi de l’enfant et de la rémunération versée à la mère porteuse, il ne s’agissait pas seulement en l’espèce d’un contrat de mère porteuse prohibé par la loi française, mais encore d’un achat d’enfant, contraire à l’ordre public. Les requérants ont alors saisi la CEDH, se plaignant d’une violation de leur droit au respect de leur vie privée et familiale (article 8) résultant du refus de transcription de l’acte de naissance indien sur les registres de l’état civil français au motif que les requérants avaient eu recours à une convention de gestation pour autrui.

Le 21 juillet 2016, la CEDH a jugé qu’il n’y a pas violation du droit au respect de la vie familiale des parents d’intention et des enfants concernés, mais qu’il y a violation du droit au respect de la vie privée des enfants. 
Elle a dans un premier temps constaté que la situation des requérants en l’espèce est similaire à celle de requérants dans sa jurisprudence antérieure. Elle a ensuite ajouté qu’elle prenait note des indications du gouvernement français selon lesquelles, postérieurement à la jurisprudence de la CEDH, la Cour de cassation a, par deux arrêts du mois de juillet 2015, procédé à un revirement de jurisprudence. Selon le gouvernement, il résulte de cette jurisprudence nouvelle qu’en présence d’un acte étranger établi régulièrement selon le droit du pays dans lequel la gestation pour autrui a été réalisée et permettant d’établir le lien de filiation avec le père biologique, plus aucun obstacle ne peut être opposé à la transcription de la filiation biologique. Il ajoute qu’en juillet 2015, la garde des Sceaux a adressée aux parquets une dépêche indiquant qu’il convenait de procéder à la transcription des actes de naissance étrangers des enfants nés à l’étranger d’une gestation pour autrui, sous réserve de leur conformité à l’article 47 du code civil. 
La CEDH a précisé que le gouvernement entend déduire de ce nouvel état du droit positif français que les pères ont désormais la possibilité d’établir leur lien de filiation par la voie de la reconnaissance de paternité ou par celle de la possession d’état. Elle a toutefois relevé le caractère hypothétique de la formule dont use le gouvernement. Elle a par ailleurs ajouté que les intéressés contestent cette thèse et que le gouvernement n’en tire lui-même aucune conclusion quant à la recevabilité ou au bien-fondé de leur requête. Elle n’a donc constaté aucune raison de conclure autrement que dans sa jurisprudence antérieure.