CEDH : mesures de surveillance prises à l’égard d’une personne impliquée dans un trafic de stupéfiants avant la loi du 28 mars 2014

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L’affaire concerne des mesures de surveillance prises à l’encontre de M. B. (géolocalisation de son véhicule et réquisition judiciaire à un opérateur téléphonique) dans le cadre d’une enquête pénale portant sur un trafic de stupéfiants.

Au cours de la procédure pénale, la validité de la réquisition de l’opérateur téléphonique et de la mise en place du dispositif de géolocalisation a été contestée. En mai 2011, la cour d’appel annula la première autorisation de géolocalisation du 10 mai 2010. Elle considéra cependant que l’autorisation de géolocalisation du 3 juin 2010 était proportionnée au but poursuivi dans la mesure où il s’agissait d’un important trafic de stupéfiants en bande organisée.

Le 22 novembre 2011, la Cour de cassation, qui se prononçait pour la première fois sur la compatibilité de la géolocalisation avec l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme, estima entre autres que la cour d’appel avait fait une exacte application de la Convention EDH. Le 14 décembre 2012, M. B. fut condamné à 12 ans d’emprisonnement et 100.000 € d’amende. Le jugement fut annulé le 17 octobre 2013 pour vice de forme. La procédure pénale est pendante.

Invoquant l’article 8 (droit au respect de la vie privée et familiale), M. B. se plaignait que la mise en place d’un dispositif de géolocalisation sur son véhicule et la réquisition à un opérateur de téléphonie pour recueillir les appels entrants et sortants mais également le « bornage » de lignes téléphoniques, permettant de suivre a posteriori ses déplacements, constituaient une ingérence dans sa vie privée.

Le 8 février 2018, la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) juge, d’une part, que dans le domaine des mesures de géolocalisation en temps réel, le droit français, écrit et non écrit, n’indiquait pas, au moment des faits et avant la loi du 28 mars 2014, avec assez de clarté l’étendue et les modalités d’exercice du pouvoir d’appréciation des autorités.

La Cour juge, d’autre part, que la réquisition judiciaire adressée à l’opérateur téléphonique constituait une ingérence dans la vie privée de M. B. mais que celle-ci était prévue par la loi et qu’elle poursuivait un but légitime (la défense de l’ordre, la prévention des infractions pénales, etc.). La Cour estime aussi que cette mesure était nécessaire dans une société démocratique car elle visait à démanteler un trafic de stupéfiants de grande ampleur. Par ailleurs, les informations obtenues par ce biais ont été utilisées dans le cadre d’une enquête et d’un procès pénal au cours duquel M. B. a bénéficié d’un contrôle effectif tel que voulu par la prééminence du droit.