CEDH : surveillance d’assurés par des détectives engagés par une assurance

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M. M. a subi des lésions corporelles lors d’un accident de la circulation en tant que passager d’un véhicule automobile. Il introduisit deux actions en réparation de son dommage ménager contre les deux conducteurs et leurs assureurs, chiffrant ses revendications à environ 1.777.353 €. L’assurance de responsabilité civile de M. M. mandata une agence de détectives privés pour le surveiller afin de constater l’existence du dommage ménager. Ses activités furent filmées pendant quatre jours, dans des lieux accessibles au public. Les photos, vidéos et le rapport de surveillance montraient que M. M. pouvait, sans grandes difficultés, porter des charges, faire ses achats, passer l’aspirateur, nettoyer et astiquer son véhicule. Son épouse apparaissait sur six photographies mais elle était difficilement identifiable. Ces documents furent versés dans les dossiers des actions en justice introduites par M. M.
De ce fait, les époux M. introduisirent une action pour atteinte à leur personnalité, mais celle-ci fut rejetée par les juridictions internes. Le Tribunal fédéral considéra notamment qu’une atteinte à la personnalité découlant d’une surveillance de la personne assurée par un détective privé peut répondre à des intérêts prépondérants d’ordre public ou privé, c’est-à-dire être justifiée par le fait que ni l’assurance ni l’ensemble de la collectivité de ses assurés ne doivent être amenées à effectuer des prestations indues.

Invoquant l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme, les époux M. se plaignaient d’avoir été surveillés par des détectives mandatés par une assurance privée pendant quatre jours.

Par un arrêt du 17 janvier 2019, la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) ne relève aucune apparence de violation de l’article 8 de la Convention et estime que la requête est manifestement mal fondée.
D’une part, la Cour constate que les investigations de l’assureur, effectuées à partir du domaine public et limitées à la constatation de la mobilité de M. M., visaient uniquement à préserver les droits patrimoniaux de l’assurance. À cet égard, la Cour estime que les juges nationaux ont reconnu un intérêt prépondérant à l’assureur et en ont conclu que l’atteinte à la personnalité de l’intéressé n’était pas illicite.
D’autre part, la Cour note que les informations éparses, recueillies par hasard à propos de Mme M. et sans aucune pertinence pour l’investigation, étaient loin de constituer une collecte systématique ou permanente. Selon la Cour, une ingérence dans la vie privée de l’intéressée n’a donc pas eu lieu.