Droit à la confidentialité pour les entreprises face à la liberté d’expression des journalistes financiers

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Une société spécialisée dans le suivi de l’endettement des entreprises a publié un article commentant l’ouverture de la procédure de mandat ad hoc pour le groupe de sociétés C.
Par la suite, elle a diffusé divers articles rendant compte de l’évolution des procédures en cours et des négociations engagées.
Plusieurs sociétés du groupe et le mandataire l’ont assigné pour obtenir le retrait de l’ensemble des articles contenant des informations confidentielles les concernant, ainsi que l’interdiction de publier d’autres articles.

Le 27 novembre 2013, la cour d’appel de Versailles rejette la demande.
L’arrêt retient que le fait pour la société d’avoir publié des informations soumises à la confidentialité par application de l’article L. 611-15 du code de commerce, qui ne crée aucune obligation à son égard, ne saurait constituer, au regard des droits essentiels à la liberté d’informer du journaliste, une violation évidente de la loi susceptible d’être sanctionnée par la juridiction des référés.
La cour d’appel ajoute que la publication ne constitue pas un trouble manifestement illicite au regard de la liberté d’informer du journaliste.

Le 15 décembre 2015, la Cour de cassation censure l’arrêt d’appel au visa de l’article 10 § 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et l’article L. 611-15 du code de commerce.
La Cour de cassation considère que la publication des informations soumises à la confidentialité constitue, au regard des droits essentiels à la liberté d’informer du journaliste, une violation évidente de la loi.
En outre, les juges du fond auraient dû rechercher « si les informations diffusées, relatives à la prévention des difficultés des sociétés du groupe C. et couvertes par la confidentialité, relevaient d’un débat d’intérêt général. »
Enfin, la Cour de cassation estime que « la diffusion d’informations relatives à une procédure de prévention des difficultés des entreprises, couvertes par la confidentialité, sans qu’il soit établi qu’elles contribuent à l’information légitime du public sur un débat d’intérêt général, constitue à elle seule un trouble manifestement illicite. »