La marque Scootlib a été déposée de bonne foi

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Titulaire des marques Vélib’ et Autolib’, désignant respectivement un service de mise à disposition de vélos et de voitures électriques, la ville de Paris a obtenu l’enregistrement de la marque Scootlib’ Paris en décembre 2011.
La ville a fait grief à la société O. d’avoir procédé, en 2007, au dépôt de la marque Scootlib et d’exploiter sous cette marque des services de location de véhicules, à la société P. d’avoir obtenu une licence d’exploitation de cette marque, à la société S. d’en être sous-licencée, à la société F. d’exploiter sous ce signe un service de location de véhicules et à un particulier d’avoir réservé les noms de domaine scootlib.com et scootlib.org. 
Elle a assigné l’ensemble de ces parties en annulation de marque pour dépôt frauduleux, en contrefaçon de marque, responsabilité civile pour atteinte à une marque de renommée, et en leur faisant, en outre, grief de concurrence déloyale et de parasitisme.

Le 26 mai 2017, la cour d’appel de Paris a dit que le dépôt de la marque Scootlib n’était pas frauduleux. Elle a en conséquence déclaré irrecevables, comme forcloses, les demandes de la ville en nullité de cette marque et rejeté son action en contrefaçon. Elle a également dit irrecevables ses demandes fondées sur l’article L. 713-5 du code de la propriété intellectuelle.
Les juges du fond ont relevé que l’annulation d’une marque, pour fraude, ne suppose pas la justification de droits antérieurs sur le signe litigieux mais la preuve d’intérêts sciemment méconnus par le déposant.
Ils ont constaté que, parmi les arguments présentés au soutien de sa demande, la ville de Paris invoquait la notoriété exceptionnelle du service Vélib’ dès son lancement au mois de juillet 2007, la connaissance de ce succès par la société O. et l’utilisation d’un visuel en référence directe aux codes graphiques adoptés pour promouvoir le service Vélib’. Ils ont ajouté que les parties proposaient toutes deux une activité de mise à disposition d’engins de déplacement.

Dans un arrêt rendu le 12 décembre 2018, la Cour de cassation approuve cette décision.

Elle considère que la cour d’appel a pu retenir, sans manquer à son obligation d’apprécier globalement l’existence d’une fraude, que celle-ci n’était pas caractérisée, dès lors qu’il n’était pas établi que la mise en oeuvre d’un projet Scootlib’ avait fait l’objet d’une évocation publique par la ville de Paris avant le dépôt de la marque Scootlib, ni que la société O. avait connaissance de ce projet au jour du dépôt de sa marque, d’autant que la communication faite autour du Vélib’ révélait une volonté politique de désengorger Paris de ses véhicules à moteur « afin d’aller vers des processus de déplacement plus écologiques, dont le vélo était le principal vecteur ».

Par ailleurs, la Haute juridiction judiciaire souligne que la ville de Paris n’a pas soutenu devant les juges du fond qu’il y avait lieu d’examiner si les conditions d’une forclusion par déchéance étaient réunies pour chacun des produits ou services désignés dans l’enregistrement de la marque seconde, ni que la forclusion par tolérance ne pourrait être opposée qu’à une action en contrefaçon de marque incriminant le dépôt et l’usage d’une marque postérieure et non à une action en contrefaçon incriminant l’usage d’un signe de nature différente comme une dénomination sociale, une enseigne ou un nom de domaine.