Prise de clichés de certaines œuvres appartenant aux collections d’un musée public à des fins de commercialisation

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Une société demandé au tribunal administratif d’Orléans l’annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite par laquelle le maire d’une commune a rejeté sa demande d’autorisation de prendre des clichés de certaines œuvres appartenant aux collections du musée des Beaux-Arts de la commune. En janvier 2009, le tribunal administratif d’Orléans a rejeté sa demande. En mai 2010, la cour administrative d’appel de Nantes a, à la demande de la société, annulé ce jugement et la décision implicite de rejet attaquée.
En octobre 2012, le Conseil d’Etat, statuant au contentieux, a annulé cet arrêt et renvoyé l’affaire devant la cour administrative d’appel de Nantes.
En février 2014, la cour administrative d’appel de Nantes, statuant sur renvoi du Conseil d’Etat, a rejeté l’appel formé contre le jugement du tribunal administratif d’Orléans par la société.

Le 23 décembre 2016, le Conseil d’Etat a rejeté la requête. Il a indiqué qu’il a jugé en 2012, que la prise de vues d’œuvres appartenant aux collections d’un musée public, à des fins de commercialisation des reproductions photographiques ainsi obtenues, doit être regardée comme une utilisation privative du domaine public mobilier impliquant la nécessité, pour celui qui entend y procéder, d’obtenir une autorisation ainsi que le prévoit l’article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques. Il a ajouté qu’une telle autorisation peut être délivrée dès lors qu’en vertu de l’article L. 2121-1 de ce code, cette activité demeure compatible avec l’affectation des œuvres au service public culturel et avec leur conservation. Le Conseil d’Etat a également rappelé qu’il est toutefois loisible à la collectivité publique affectataire d’œuvres relevant de la catégorie des biens mentionnés au 8° de l’article L. 2112-1 du même code, dans le respect du principe d’égalité et sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, de ne pas autoriser un usage privatif de ce domaine public mobilier.

Il a par ailleurs rappelé que les motifs avancés par la commune pour justifier la décision implicite de refus opposée, en l’espèce, à la société requérante étaient tirés de ce qu’elle entendait conserver un contrôle sur les conditions dans lesquelles sont établies et diffusées des reproductions photographiques des œuvres exposées dans le musée et de ce qu’une diffusion excessive de telles reproductions pourrait préjudicier à l’attractivité de ce musée et nuire à sa fréquentation par le public. Le Conseil d’Etat a considéré qu’en jugeant que de tels motifs, qui se rapportent à l’intérêt du domaine public et de son affectation, étaient de nature à fonder légalement cette décision, la cour administrative d’appel n’a pas commis d’erreur de droit et n’a pas insuffisamment motivé son arrêt.

Il a ajouté que le principe d’égalité ne s’oppose pas à ce que l’autorité administrative règle de façon différente des situations différentes, pourvu que la différence de traitement qui en résulte soit en rapport avec l’objet de la décision qui l’établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier. Le Conseil d’Etat a notamment considéré qu’au regard de l’objet de la mesure en cause, qui concerne une autorisation d’utilisation privative de tout ou partie du domaine public mobilier constitué par les collections d’un musée, les photographes professionnels sollicitant une telle autorisation pour réaliser des clichés des œuvres à des fins de commercialisation pour leur propre compte des reproductions obtenues ne sont pas placés dans la même situation que les photographes auxquels l’autorité domaniale délivre une telle autorisation afin qu’ils réalisent, à sa demande et pour ses propres besoins, des photographies des œuvres du musée, sans qu’ait à cet égard d’incidence la circonstance que l’autorisation délivrée à cette seconde catégorie de photographes pourrait avoir, le cas échéant, indirectement pour effet de leur permettre de commercialiser pour leur propre compte les reproductions réalisées. La cour administrative d’appel n’a, par suite, selon le Conseil d’Etat, ni commis d’erreur de droit, ni insuffisamment motivé son arrêt, en jugeant que les deux catégories de photographes mentionnées ci-dessus pouvaient, sans que soit méconnu le principe d’égalité, faire l’objet d’un traitement différent.

Enfin, le Conseil d’Etat a précisé que la prise de vues d’œuvres relevant des collections d’un musée, à des fins de commercialisation des reproductions photographiques ainsi obtenues, doit être regardée comme une utilisation privative du domaine public mobilier impliquant la nécessité, pour celui qui entend y procéder, d’obtenir une autorisation.
Il a conclu que la société n’était pas fondée à demander l’annulation de l’arrêt qu’elle attaque.