Renseignement : validation par le Conseil constitutionnel et publication des lois

Actualités Legalnews ©

Le Premier ministre avait présenté un projet de loi relatif au renseignement lors du Conseil des ministres du 19 mars 2015 qui avait été déposé au Parlement le même jour. Ce projet de loi a pour objectif de donner aux services de renseignement des moyens à la hauteur de la menace à laquelle ils sont confrontés, et de garantir la protection des libertés publiques en subordonnant le recours aux mesures de surveillance à l’autorité du pouvoir politique et à un double contrôle, celui d’une autorité extérieure indépendante, et celui du Conseil d’Etat.
Après les travaux parlementaires, le projet de loi relatif au renseignement a été adopté définitivement par l’Assemblée nationale, le 24 juin 2015.
Ce projet détermine, entre autre, les pouvoirs d’une Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR) nouvellement créée, des dispositions relatives aux lanceurs d’alerte, des dispositifs visant à renforcer la lutte contre le terrorisme et au contre-espionnage, et des dispositions relatives au renseignement pénitentiaire.

Saisi par plusieurs parlementaires et par le chef de l’Etat, le Conseil constitutionnel, dans une décision du 23 juillet 2015, juge que les dispositions du nouvel article L. 851-3 du code de la sécurité intérieure (CSI), qui autorisent les services du premier ministre à imposer l’installation de boîtes noires pour détecter des comportements suspects sur internet, ne portent pas une atteinte manifestement disproportionnée au droit au respect de la vie privée.
Le Conseil constitutionnel censure en revanche la possibilité d’installer des moyens de géolocalisation ou d’écoute sans recourir à l’autorisation préalable du premier ministre et à l’avis de la CNCTR, « en cas d’urgence liée à une menace imminente ». Il a jugé cette possibilité portait une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et au secret des correspondances.
Il censure également l’article L. 854-1 du même code, relatif aux mesures de surveillance internationale, au motif « qu’en ne définissant dans la loi ni les conditions d’exploitation, de conservation et de destruction des renseignements collectés en application de cet article, ni celles du contrôle par la commission nationale de contrôle des techniques de renseignement de la légalité des autorisations délivrées en application de ce même article et de leurs conditions de mise en œuvre, le législateur n’a pas déterminé les règles concernant les garanties fondamentales accordées au citoyen pour l’exercice des libertés publiques ».
Le Conseil constitutionnel juge conformes à la Constitution les dispositions de la loi fixant les durées de conservation en fonction des caractéristiques des renseignements collectés.
Enfin, il juge également conformes à la Constitution les dispositions de l’article L. 852-1 du CSI qui régissent les interceptions administratives de correspondances émises par la voie des communications électroniques.

Ce projet de loi s’accompagne d’un projet de loi organique relatif à la nomination du président de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR), commission créée par la loi sur le renseignement, publiée le 26 juillet 2015 également. La CNCTR prendra la suite de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS) mais avec un champ de compétence étendu à l’ensemble des techniques de recueil de renseignement et avec des prérogatives renforcées. Ainsi, elle sera consultée pour avis, hors cas d’urgence, avant toute autorisation de mise en oeuvre d’une technique délivrée par le premier ministre. Elle pourra également adresser des recommandations et observations au premier ministre et saisir le Conseil d’Etat d’un recours juridictionnel. Le président de cette CNCTR sera nommé par décret du président de la République. Le projet de loi soumet sa nomination à la procédure prévue au cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution qui requiert l’avis préalable des commissions permanentes intéressées des deux assemblées. L’opposition des commissions parlementaires au trois-cinquièmes des suffrages exprimés empêcherait alors la nomination du candidat présenté.
Saisi également de ce projet de loi, le Conseil constitutionnel, dans une décision du 23 juillet 2015, juge qu’eu égard à son importance pour la garantie des droits et des libertés, cette fonction entre dans le champ d’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution.

Les lois ont été publiées au Journal officiel du 26 juillet 2015.