Un administrateur réseau condamné pour fraude informatique et une inspectrice du travail pour violation du secret professionnel

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A la suite de la publication de documents confidentiels établis par le Directeur de Ressources Humaines, et des mails émis ou reçus par celui-ci, une expertise a mis en évidence la manipulation par un administrateur réseau de certains des documents qui avaient été publiés.
Cet administrateur expliquait qu’il était en conflit avec son entreprise pour le paiement des heures supplémentaires.
Par ailleurs, il déclarait avoir trouvé un document dans lequel il apparaissait que la société avait l’intention de le licencier en utilisant des moyens déloyaux.
Il avait alors décidé de consulter les serveurs de fichiers abritant toutes les données des documents partagés au sein de la société à la recherche de documents qui auraient pu le concerner.
Il a accédé au répertoire des ressources humaines et a découvert un document sur lequel figurait le nom de l’inspectrice du travail et de son supérieur ainsi que des éléments la concernant.
Il en fait une copie d’écran et l’a enregistré sur son téléphone portable. 
Par la suite, il a alerté l’inspectrice et lui a envoyé les documents. Cette dernière les a transmis à différents syndicats de salariés, et ces documents se sont retrouvés publiés dans la presse.
La société a alors déposé plainte.

Le 4 décembre 2015, le tribunal de grande instance d’Annecy condamne l’administrateur réseau pour accès et maintien frauduleux à un traitement automatisé de données, atteinte au secret des correspondances électroniques et l’inspectrice du travail pour recel de correspondances et violation du secret professionnel.

Concernant l’administrateur, le tribunal considère qu’il s’est introduit frauduleusement dans le système de traitement automatisé des données de la société.
En effet, les juges relèvent qu’ »il a consulté les serveurs de fichiers RUM17NT sans lien avec sa fonction, s’y est maintenu dans une intention autre que celle d’exécuter son travail habituel de développement du WIFI ».
En outre, les juges refusent d’appliquer le statut protecteur de lanceur d’alerte de l’article L. 1132-3-3 du code du Travail qui a été créé par la loi du 6 décembre 2013, postérieurement aux faits.
Par ailleurs, « s’agissant des documents obtenus par l’administrateur à la suite de son intrusion dans le système de traitement automatisé de la société, il n’en a pas eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions, ils ne le concernaient pas personnellement et n’étaient pas nécessaires à l’exercice de sa défense dans un cadre prud’hommal ».
Pour le tribunal, l’administrateur aurait pu, « ébranlé à la lecture du document attestant de l’intention de la société de le licencier, utiliser ultérieurement ce document, qu’il a affirmé avoir trouvé par hasard dans la photocopieuse, dans le cadre d’une procédure prud’hommale ».

Concernant l’inspectrice du travail, le tribunal estime que « l’infraction de recel de détournement de correspondance électronique apparaît constituée ».
En effet, les juges relèvent qu’ »elle ne pouvait ignorer, tant par le contenu des mails, que par l’identité des destinataires », que ces documents « avaient été obtenus sans l’accord des titulaires des boîtes mail, l’évidence de cette connaissance est renforcée par l’organisation de leur envoi anonyme ».
L’inspectrice n’a pas non plus respecté le secret professionnel en diffusant aux organisations syndicales des documents internes à la société et en rendant possible leur publication dans la presse et sur internet.
En outre, le tribunal écarte là aussi le statut protecteur de lanceur d’alerte.
Pour finir, il considère que « les documents diffusés aux organisations syndicales (…) n’ont pas été obtenus dans le cadre de l’exercice de ses fonctions, ils n’ont pas été utilisés dans le strict exercice de sa défense et il n’est pas établi qu’ils constituent un crime ou un délit ».
En conséquence, le tribunal estime que « le délit de violation du secret professionnel apparaît constitué ».