Affaire Bettencourt : condamnation de la presse pour atteinte à la vie privée

Droit de la presse - Droit de la vie privée

A la suite de la diffusion, par des journaux, des retranscriptions d’extraits des enregistrements clandestins réalisés dans le salon privé de Liliane Bettencourt, cette dernière avait assigné les société d’exploitation, le directeur de la publication de l’un et des journalistes rédacteurs des l’articles, devant le juge des référés pour voir ordonner le retrait des sites de presse de tout ou partie de la transcription des enregistrements, l’interdiction de toute nouvelle publication de ces retranscriptions et la publication d’un communiqué judiciaire.

Après plusieurs procédures, la Cour de cassation, dans un arrêt en date du 6 octobre 2011, avait jugé « que constitue une atteinte à l’intimité de la vie privée, que ne légitime pas l’information du public, la captation, l’enregistrement ou la transmission sans le consentement de leur auteur des paroles prononcées à titre privé ou confidentiel », car en l’espèce, les entretiens litigieux présentaient un tel caractère, et renvoyé les parties devant la cour d’appel de Versailles.

Statuant sur renvoi après cassation, la cour d’appel de Versailles, dans trois arrêts du 4 juillet 2013, ordonne aux journaux de retirer de leurs sites Internet les retranscriptions des enregistrements pirates. Elle retient que le trouble manifestement illicite est constitué, les enregistrements, pratiqués de façon clandestine ayant, par leur localisation et leur durée, nécessairement conduit leur auteur à pénétrer dans l’intimité des personnes concernées.

Au surplus, les extraits rendus publics fournissent des informations sur l’état de santé de la milliardaire, et par suite, son intimité. Il en est de même des sentiments qu’elle exprime à l’égard de personnes de son entourage. La publication par les défendeurs de ces enregistrements caractérise le trouble manifestement illicite.

Enfin, la cour ajoute que l’exigence d’information du public dans une société démocratique, énoncée par la Convention européenne des droits de l’homme, ne peut légitimer la publication, même par extraits, d’enregistrements obtenus en violation du droit au respect de la vie privée.

10/07/2013