CEDH : atteinte à la vie privée par l’accès sans autorisation à des fichiers informatiques contenant des preuves

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Un ressortissant et résidant espagnol a déposé son ordinateur dans un magasin d’informatique en vue du remplacement de l’enregistreur défectueux. Après avoir effectué le remplacement, le technicien a procédé à un test en ouvrant plusieurs fichiers et a constaté qu’il contenait des éléments pédopornographiques, ce qu’il a dénoncé auprès des autorités. Les agents de police examinèrent son contenu et l’investigation policière fut ensuite portée à la connaissance du juge d’instruction.
L’intéressé a été arrêté et condamné à une peine de quatre ans d’emprisonnement pour détention et diffusion d’images de mineurs présentant un caractère pornographique. 

Devant la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH), le requérant dénonce une ingérence dans son droit au respect de sa vie privée et de sa correspondance et invoque la violation de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme (Convention EDH).

Dans une décision du 30 mai 2017, la Cour estime que l’accès aux dossiers de l’ordinateur du requérant et sa condamnation qui s’en est ensuivie constituent une ingérence des autorités publiques dans son droit à la vie privée, relevant que cette ingérence était prévue par les dispositions du droit national qui établit la règle de l’autorisation judiciaire préalable lorsqu’une atteinte à la vie privée d’une personne est en jeu, sauf dans les cas de situations d’urgence permettant un contrôle judiciaire postérieur.
La CEDH constate également que l’ingérence poursuivait le but légitime de la prévention des infractions pénales ou de la protection des droits d’autrui, les enfants et autres personnes vulnérables ayant droit à la protection de l’État sous la forme d’une prévention efficace les mettant à l’abri des formes aussi graves d’ingérence dans des aspects essentiels de leur vie privée.

Toutefois, la Cour juge que la saisie et l’examen des archives de l’ordinateur par la police n’étaient pas proportionnés aux buts légitimes poursuivis. En effet, la Cour soulève la difficulté d’apprécier l’urgence qui aurait contraint la police à saisir l’ordinateur du requérant et à accéder à leur contenu, sans obtenir au préalable l’autorisation judiciaire normalement requise, puisqu’il n’existait aucun risque de disparition de fichiers et qu’il s’agissait d’un ordinateur saisi et retenu par la police et non connecté à internet.
Ne parvenant pas à déceler les raisons pour lesquelles l’attente d’une autorisation judiciaire préalable à l’intervention sur l’ordinateur, qui pouvait être obtenue relativement rapidement, aurait entravé l’enquête menée par la police sur les faits dénoncés, elle conclut à la violation de l’article 8 de la Convention EDH.