CJUE : la marque collective déroge-t-elle au droit des marques ?

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L’association chypriote titulaire de la marque collective de l’Union européenne « HALLOUMI », enregistrée pour des fromages, a formé opposition à l’enregistrement en tant que marque de l’UE du signe figuratif comportant l’élément verbal « BBQLOUMI », demandé par une société bulgare, notamment pour des fromages.

L’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) a rejeté cette opposition au motif qu’il n’existait pas de risque de confusion quant à l’origine des produits entre les deux marques. Le Tribunal de l’Union européenne (TUE) a validé cette décision.

Dans un arrêt du 5 mars 2020, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) se prononce tout d’abord sur l’applicabilité aux affaires concernant une marque antérieure collective de la jurisprudence établissant, pour les marques individuelles, les critères au regard desquels le risque de confusion doit être apprécié.
A cet égard, elle juge que, dans le cas où la marque antérieure est une marque collective, dont la fonction essentielle est de distinguer les produits ou les services des membres de l’association qui en est le titulaire de ceux d’autres entreprises, le risque de confusion doit être entendu comme étant le risque que le public puisse croire que les produits ou les services visés par la marque antérieure et ceux visés par la marque demandée proviennent tous de membres de l’association qui est titulaire de la marque antérieure ou, le cas échéant, d’entreprises économiquement liées à ces membres ou à cette association.
En effet, aucune des caractéristiques que présentent les marques collectives de l’UE ne justifie qu’il soit dérogé, en cas d’opposition fondée sur une telle marque, aux critères d’appréciation du risque de confusion qui ressortent de la jurisprudence.

Ensuite, le titulaire de la marque collective en cause faisait valoir que le caractère distinctif de la marque antérieure devrait être apprécié différemment lorsque cette marque est une marque collective de l’UE.
La Cour rejette cet argument : les articles 67 à 74 du règlement sur la marque de l’Union européenne, relatifs aux marques collectives, ne prévoient aucune disposition contraire, et l’article 66, § 2, de ce règlement ne constitue pas une exception à cette exigence de caractère distinctif.
Lorsqu’une association demande l’enregistrement, en tant que marque collective de l’UE, d’un signe pouvant désigner une provenance géographique, elle doit s’assurer que ce signe est pourvu d’éléments qui permettent au consommateur de distinguer les produits ou les services de ses membres de ceux d’autres entreprises.

Enfin, s’agissant de l’appréciation du risque de confusion, la Cour considère qu’en l’espèce, il était nécessaire d’examiner si le degré faible de la similitude des marques en conflit était compensé par le degré plus élevé de similitude, voire l’identité, des produits désignés par ces marques. Or, l’appréciation à laquelle s’est livré le TUE ne satisfait pas à l’exigence d’une appréciation globale qui tienne compte de l’interdépendance des facteurs pertinents.

Par conséquent, la CJUE annule l’arrêt du TUE et a renvoie l’affaire devant celui-ci afin qu’il procède à un nouvel examen de l’existence d’un risque de confusion.