CJUE : Louboutin ne pourrait prétendre à l’exclusivité des semelles rouges

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M. Louboutin, qui crée des chaussures à talons hauts pour femmes ayant pour particularité d’avoir la semelle extérieure systématiquement revêtue de la couleur rouge, a saisi les juridictions néerlandaises afin de faire constater qu’une société néerlandaise, qui a vendu des chaussures à talons hauts pour femmes à semelle rouge, s’était rendue coupable d’une contrefaçon.

La société néerlandaise soutenait que la marque déposée par la société Louboutin était nulle étant donné que la directive sur les marques du 22 octobre 2008 énumère plusieurs motifs de nullité ou de refus à l’enregistrement, notamment les signes constitués exclusivement par la forme qui donne une valeur substantielle au produit.

Le rechtbank Den Haag (tribunal de La Haye, Pays-Bas) a décidé d’interroger à ce sujet la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE). Il considère que la marque en cause est indissociablement liée à une semelle de chaussure et que, selon ladite directive, la notion de « forme » ne serait pas forcément limitée aux seules caractéristiques tridimensionnelles d’un produit (telles que les contours, la dimension et le volume) mais engloberait également les couleurs.

Dans ses conclusions rendues le 6 février 2018, l’avocat général près la CJUE Maciej Szpunar considère qu’un signe qui combine la couleur et la forme est susceptible d’être frappé par l’interdiction visée dans la directive. Il propose donc à la Cour de répondre que les motifs de refus ou de nullité d’une marque sont susceptibles de s’appliquer à un signe constitué par la forme du produit, qui revendique la protection pour une couleur déterminée.

Il considère qu’il s’agit non pas en l’espèce d’une forme pleinement abstraite ou d’une forme dont l’importance est négligeable, mais toujours d’une forme de semelle. De plus, il doute que la couleur rouge puisse remplir la fonction essentielle de la marque et identifier son titulaire lorsque cette couleur est utilisée en dehors de son contexte propre, c’est-à-dire indépendamment de la forme de la semelle.

Toutefois, l’avocat général rappelle que la qualification de la marque constitue une appréciation factuelle qui incombe au tribunal néerlandais. Il en va de même pour la question de savoir si la couleur rouge de la semelle donne une valeur substantielle au produit.

Enfin, il rappelle que son analyse porte exclusivement sur la valeur intrinsèque de la forme et ne doit pas tenir compte de l’attrait exercé par le produit découlant de la réputation de cette marque ou de son titulaire.