Contrefaçon et concurrence déloyale : suggestion à tort, dans les balises d’un site internet, de la vente de produits d’une marque concurrente

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La société A., constituée en 1998, vend sur internet depuis 2004 du matériel outdoor, de randonnée et de survie. Ses références sont accessibles à l’adresse www.inuka.com dont le nom de domaine a été réservé en octobre 2003 par son gérant. Le signe « Inuka » a fait l’objet d’un dépôt de marque française en juin 2011.
En 2011, la société B. était éditrice d’un site internet de vente en ligne des produits d’une marque accessible sur un site internet. Durant l’année 2011, le gérant de la société A. a constaté que ce site internet ressortait parmi les résultats de requêtes comportant le mot clé Inuka sur le moteur de recherche Google.
En juillet 2012, la société A. et son gérant ont fait assigner la société B. devant le tribunal de grande instance (TGI) de Lyon en contrefaçon de marque, concurrence déloyale et pratique commerciale trompeuse. La société B. ayant été absorbée par la société C., les demandes ont par suite été redirigées contre cette dernière.

Le 17 janvier 2017, le tribunal de grande instance (TGI) de Lyon a notamment déclaré que la société C. a commis des actes de contrefaçon de marque au préjudice du gérant de la société A. et l’a condamné a lui verser la somme de 20.000 € en indemnisation des actes de contrefaçon.
Il a également débouté le gérant de la société A. de sa demande d’interdiction d’utiliser à quelque titre que ce soit le signe distinctif « Inuka », ordonné la publication du dispositif du jugement pendant une durée d’une semaine sur la page d’accueil du site internet de la société C. et débouté le gérant de sa demande de publication sur le site internet de la société A.
Enfin, il a jugé que la société C. a commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société A. et l’a condamné à payer la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts.

Concernant l’action en contrefaçon du gérant de la société A., le TGI a jugé qu’en l’espèce le signe Inuka apparaît au sein de la balise-titre et de la balise-description qui ont nécessairement été conçues par la société C., ces balises ne procédant absolument pas du hasard. Il en a déduit qu’ainsi, les intitulés desdites balises montrent que la société C. a entendu faire un usage du signe Inuka pour orienter une requête, désigner des produits et les proposer à la vente. Le TGI a jugé que, dès lors que le consommateur recherchant des produits de la marque Inuka sur le moteur de recherche Google est dirigé vers des pages du site internet de la société C. censées lui permettre d’acheter des produits Inuka pour finalement lui en proposer d’autres, l’usage du signe Inuka intervient dans le contexte d’une activité commerciale visant un avantage économique consistant à capter une partie de la clientèle intéressée par les produits de la marque Inuka. En conséquence, le TGI a considéré qu’il existe bien un usage du signe dans la vie des affaires. Il a ajouté que la société C. ne peut raisonnablement soutenir que l’usage du signe litigieux ne porte pas atteinte à la fonction de garantie d’origine de la marque au prétexte que le consommateur n’est pas amené à croire en l’existence d’un lien entre le propriétaire de la marque Inuka et la société C.
Enfin, le TGI a précisé qu’il est indifférent que le résultat guidant l’internaute vers le site de la société C. ne soit référencé qu’en cinquième position sur le moteur de recherche Google, soit moins bien que le site de la société A., ou que la reproduction de la marque Inuka n’ait pas abouti à une amélioration du référencement du site internet de la société C. et à une dégradation de celui du site internet de la société A.
Le TGI a conclu qu’il y a donc lieu de retenir que la société C. a contrefait la marque en la reproduisant à trois reprises, dans la balise-titre, dans la balise description puis sur son site internet.

S’agissant de l’action en concurrence déloyale de la société A., le TGI a estimé, qu’en l’espèce, l’usage du terme Inuka par la société C. est source de confusion au préjudice de la société A. qui dispose d’une licence de marque sur ce signe, peu importe qu’elle n’ait pas été publiée ou qu’elle ne soit pas écrite, et qui exploite ce signe à titre de nom commercial.
Il a en effet indiqué que l’emploi de l’expression « large choix de Inuka » suggère clairement que la société C. est autorisée à distribuer des produits authentiques marqués Inuka qui seraient de ce fait identiques à ceux proposés par la société A. chargée par le titulaire de marque de l’exploitation des produits authentiques. Le TGI a estimé qu’une telle allégation est susceptible d’altérer le comportement du consommateur qui pourra s’être dirigé vers le site internet de la société C. pour y acheter des produits marqués Inuka alors même qu’ils ne sont pas disponibles. Il a précisé que la mention « nous n’avons aucun résultat pour : Inuka » n’intervenait qu’après avoir orienté le consommateur sur la page du site internet de la société C. et faisant immédiatement place à la proposition d’autres produits d’une marque différente. Le TGI a jugé que ces actes constituent une faute de concurrence déloyale permettant à la société C. de capter la clientèle intéressée par les produits marqués Inuka au préjudice de la société A. qui en assure la distribution.
De plus, le TGI a souligné qu’en utilisant le terme Inuka dans le cadre du référencement de son site, la société C. a indument profité des investissements de la société A. en se plaçant dans son sillage. En conséquence, il a retenu l’existence d’actes de concurrence déloyale commis à l’encontre de la société A.