De justes motifs de non-exploitation d’une marque

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La société P., titulaire de la marque « Manhattan », a agi en déchéance des droits de la société S., titulaire de marques relatives au même signe, désignant des produits du tabac. La société S. a demandé, à titre reconventionnel, la déchéance des droits de la société P. sur sa marque. La société P. a opposé à la société S. l’existence d’un juste motif à la non-exploitation en France de leurs marques.

La cour d’appel de Paris a déclaré mal fondée la demande de la société S.
Les juges du fond ont retenu que l’exploitation par la société P. de ses marques pour un produit de tabac aurait, en application des articles L. 3511-3 et suivants du code de la santé publique, issus de la loi Evin, porté atteinte aux droits antérieurs de la société S. sur sa propre marque et aurait ouvert à celle-ci une action en responsabilité à leur encontre, même si les dispositions de la loi Evin n’étaient pas de nature à restreindre l’exploitation de la marque de la société S.
Ils en ont déduit que la société P. justifiait d’une menace de poursuite jusqu’au prononcé de la déchéance des droits de la société S. sur sa marque antérieure et qu’elle justifiait, par conséquent, de justes motifs de non-exploitation de leurs marques.

Dans un arrêt du 2 février 2016, la Cour de cassation rejette le pourvoi de la société S.
Elle considère que c’est à bon droit que la cour d’appel a retenu que la législation relative à la lutte contre le tabagisme constituait pour la société P. un obstacle en relation directe avec ses marques, indépendant de sa volonté, quand bien même cette société aurait déposé la marque française et renouvelé les deux marques en connaissance de cette législation, et rendant l’usage en France des marques impossible ou déraisonnable.