Dépôt de marque frauduleux effectué dans l’intention de priver autrui d’un signe nécessaire à son activité

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M. X., est l’auteur des paroles de la chanson intitulée « Allo Papy » mettant en scène une enfant prénommée Lili, enregistrée en juin 2005 et de la chanson intitulée « A l’école », mettant en scène un personnage dénommé « Bébé Lilly », écrite en mars 2006.

Un disque comprenant ces deux titres a été commercialisé par une société sous l’intitulé « Allo Papy Bébé Lilly ».
Ayant appris que cette société avait déposé une marque verbale française et une marque verbale internationale « Bébé Lilly », M. X. l’a assignée pour dépôt frauduleux et trompeur, demandant le transfert à son profit des deux marques.
M. X. ayant lui-même déposé une marque « Bébé Lilly » en 2010, la société a demandé l’annulation de cette dernière pour atteinte à ses droits antérieurs.

La cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 27 janvier 2015, rejette la demande en revendication formée par M. X., retenant que celui-ci ne justifie pas de droits d’auteur sur la dénomination « Bébé Lilly » et qu’il ne démontre pas en quoi la société aurait manqué à ses obligations contractuelles de loyauté en déposant une marque portant sur un signe sur lequel il ne justifie pas avoir de droits.
Les juges du fond rejettent également la demande fondée sur le caractère déceptif des marques verbales française et internationale, énonçant que la tromperie sur l’origine et la paternité des oeuvres et des enregistrements n’est pas visée par l’article L. 711-3 du code de la propriété intellectuelle selon lequel ne peut être adopté comme marque ou élément de marque un signe de nature à tromper le public.

La Cour de cassation, dans une décision du 11 janvier 2017, casse l’arrêt d’appel, tout d’abord au visa de l’article L. 712-6 du code de la propriété intellectuelle, énonçant que le dépôt de marque est entaché de fraude lorsqu’il est effectué dans l’intention de priver autrui d’un signe nécessaire à son activité ainsi qu’en application du principe « fraus omnia corrumpit ».
Elle retient que la cour d’appel de Paris n’a pas recherché si, en procédant à ces dépôts, la société n’avait pas cherché à s’approprier la dénomination du personnage « Bébé Lilly », privant ainsi M. X. de toute possibilité d’exploiter ce dernier dans l’exercice de son activité.
Enfin, la Haute juridiction judiciaire censure les juges du fond, au visa de l’article L. 711-3 du code de la propriété intellectuelle, rappelant qu’une marque peut être déceptive lorsqu’elle est susceptible de tromper le consommateur sur la relation entre le signe qu’elle utilise et une oeuvre relevant de la protection par le droit d’auteur ou un droit dérivé.