Diffamation envers une commune : la nécessité d’une délibération préalable et précise du conseil municipal

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Suite à la diffusion aux habitants d’une commune d’un texte intitulé « Un scandale peut en cacher un autre » par voie de tracts et via un blog tenu par Mme Z., la commune en question ainsi que différents habitants dont le maire ont porté plainte et se sont constitués parties civiles du chef de diffamation contre Mme Z. Cette dernière a présenté une requête en annulation.

Dans un arrêt du 13 juin 2012, la chambre d’instruction de la cour d’appel de Dijon a prononcé la nullité de la plainte déposée par la commune. Les juges du fond ont basé leur raisonnement sur l’article 48-1 de la loi du 29 juillet 1881. Le conseil municipal a préalablement délibéré  avant d’engager les poursuites, mais cette délibération ne respectait pas les obligations légales de l’article 48-1 de la loi du 29 juillet 1881. La cour d’appel a ainsi relevé que la délibération n’indiquait pas précisément le document incriminé et ne permettait pas de déterminer s’il s’agissait d’une plainte pour diffamation envers un citoyen chargé d’un mandat public ou envers un corps constitué.

La commune se pourvoit en cassation. Dans son pourvoi, la commune fait prévaloir l’absence de formalisme lié à l’autorisation délivrée par l’assemblée générale d’un corps constitué pour pouvoir agir en diffamation. La commune soutient également que la délibération prise était suffisamment précise. La délibération faisait en effet état des propos calomnieux imputables à Mme Z., du caractère diffamatoire de ces propos, de l’intention du conseil municipal de porter plainte, et de l’autorisation du maire à ester en justice contre Mme Z.

Dans un arrêt du 25 juin 2013, la Cour de cassation rejette le pourvoi de la commune. La chambre criminelle précise que la délibération préalable prévue à l’article 48-1 de la loi de 1881 en cas de diffamation envers un corps constitué doit indiquer les faits qu’elle entend dénoncer et mentionner la nature des poursuites qu’elle requiert. Ces éléments doivent être relatés avec une précision suffisante, sans que les éventuelles insuffisances puissent être réparées par le réquisitoire introductif. La chambre criminelle suit donc le raisonnement des juges du fond : la délibération du conseil municipal ne répond pas aux exigences légales de l’article 48-1 de la loi du 29 juillet 1881.

En ce qui concerne la plainte pour diffamation contre des particuliers, la cour d’appel a fait une exacte application de la loi, pour la Cour de cassation. L’arrêt retient que cette plainte est concomitante à une autre plainte incriminant les mêmes faits sous des qualifications à la fois de diffamation publique envers un particulier et de diffamation publique envers un citoyen chargé d’un mandat public. Pour la Cour de cassation, il existe donc une incertitude qui ne permet pas aux personnes mises en cause de connaître avec précision la qualification des faits qui leur sont imputés, ce qui justifie le rejet du pourvoi.

17/10/2013