Illustration d’une pochette de disque par une oeuvre picturale

Actualités Legalnews ©

Au cours de l’été 1970, le fils du peintre Emile Frandsen a donné au chanteur et compositeur Eric Clapton un tableau intitulé « La Jeune fille au bouquet », peint par son père. Le tableau ayant été reproduit sur la pochette de son album « Layla », publié en 1970, une des filles du peintre a assigné la société de production et le chanteur pour voir interdire toute exploitation de la reproduction de l’oeuvre, ordonner le retrait des supports de diffusion du disque et réparer son préjudice né de la violation du droit de divulgation et de la dénaturation de l’œuvre.

La cour d’appel de Paris a rejeté sa demande tendant à voir juger que les défendeurs avaient dénaturé l’oeuvre en la reproduisant et en la diffusant sous forme d’albums phonographiques et comme signe distinctif de ceux-ci. Les juges du fond ont relevé que la reproduction de l’oeuvre figurant sur la pochette des albums était intégrale et comportait la signature du peintre, excluant ainsi qu’elle soit mutilée par des adjonctions ou des surimpressions. Ils ont estimé qu’une telle reproduction, réalisée à seule fin d’illustration de la pochette, ne servait pas un dessein publicitaire.

Dans un arrêt rendu le 10 octobre 2018, la Cour de cassation approuve les juges du fond sur ce point.

En revanche, elle considère que la cour d’appel a violé les articles L. 111-3 et L. 121-2 du code de la propriété intellectuelle en rejetant les demandes de l’héritière du peintre en réparation de la violation du droit de divulgation, au motif que celui-ci s’épuise par son premier exercice, qui, en l’espèce, correspond à la remise du tableau, en 1970. La Haute juridiction judiciaire considère que les juges du fond se sont ainsi déterminés par un motif tiré de la seule remise du support matériel de l’oeuvre à un tiers, laquelle est insuffisante à caractériser l’exercice par l’auteur ou son ayant droit du droit de divulgation de celle-ci.

Enfin, la Cour de cassation observe que pour rejeter les demandes d’interdiction et de retrait des supports de diffusion, la cour d’appel a retenu qu’en l’absence de mise en cause de l’ensemble de coauteurs de l’album litigieux, les mesures sollicitées susceptibles de porter atteinte à leurs droits ne peuvent prospérer : en relevant d’office ce moyen, sans inviter les parties à présenter leurs observations, les juges du fond ont violé l’article 16 du code de procédure civile.