La promotion des valeurs républicaines n’en interdit pas la critique

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Le 2 février 2017, dans le cadre de l’émission quotidienne « On n’est pas forcément d’accord » diffusée sur l’antenne de la radio RTL, le chroniqueur Eric Zemmour a commenté de manière critique l’application faite selon lui par la Cour suprême des Etats-Unis de ce qu’il a appelé le « principe de non discrimination » et dénoncé l’influence de cette jurisprudence sur la Cour européenne des droits de l’Homme, le Conseil constitutionnel et le Conseil d’Etat, accusés de perpétrer un « putsch judiciaire ».

Le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) a alors adressé à la radio une mise en demeure de respecter à l’avenir les obligations qui résultent pour elle de l’article 2-4 de la convention conclue le 2 octobre 2012 entre le CSA et la radio, aux termes duquel : « Le titulaire veille dans son programme (…) à promouvoir les valeurs d’intégration et de solidarité qui sont celles de la République. (…) Le titulaire contribue aux actions en faveur de la cohésion sociale et à la lutte contre les discriminations ».

Saisi de la demande d’annulation de cette décision, le Conseil d’Etat énonce, dans un arrêt du 15 octobre 2018, que l’engagement prévu à l’article 2-4 de la convention précitée « de promouvoir ces valeurs et de contribuer à la lutte contre les discriminations doit se combiner avec le principe de la liberté de communication des pensées et des opinions. Eu égard à ce principe, cet engagement ne saurait être interprété comme imposant à l’éditeur du service de prohiber sur son antenne toute critique des principes et des valeurs républicains« .

En l’espèce, la Haute juridiction administrative relève que dans la chronique en cause, le polémiste « a exprimé de manière polémique son point de vue sur la prohibition des discriminations, telle qu’interprétée, selon lui de manière extensive, par les juridictions aux Etats-Unis et en France, auxquelles il a reproché de rendre impossible toute différence de traitement ». En outre, cette prise de parole intervenait dans le cadre d’une émission quotidienne de trois minutes à laquelle sont invités des chroniqueurs de différentes opinions et dont le titre même invite les auditeurs à ne la recevoir qu’en tenant compte de son caractère polémique.

Dans ces conditions, le Conseil d’Etat considère que c’est à tort que le CSA a estimé pouvoir relever une méconnaissance des obligations résultant de l’article 2-4 de la convention et adresser en conséquence à la requérante une mise en demeure.