Revenge porn : caractérisation de la violation du droit à la vie privée

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Se plaignant d’appels et de messages téléphoniques malveillants adressés à son épouse, sa soeur et lui-même, ainsi que de la diffusion de photographies le dévoilant dans son intimité, un homme a fait assigner la femme avec qui il avait entretenu une relation extra-conjugale.

Au soutien de sa demande de réparation du préjudice subi, le requérant faisait valoir que le droit au respect de la vie privée et le droit à l’image constituent deux droits distincts. 
Au titre du premier, il invoquait le fait que la diffusion de ses correspondances intimes et à caractère sexuel avait gravement porté atteinte au secret de son intimité et l’avait profondément affecté. 
Au titre du second, il expliquait avoir subi un véritable déshonneur du fait de la diffusion de photographies très intimes et à caractère sexuel auprès de son entourage.

De son côté, la défenderesse soutenait qu’il ne pouvait y avoir violation de la vie privée de son ex-amant dès lors que l’entourage de ce dernier, y compris son épouse, était au courant de cette relation extra-conjugale. S’agissant de la diffusion de photographies, elle précise avoir obtenu l’autorisation de les diffuser directement de sa part, de sorte qu’il ne pouvait y avoir atteinte à son droit à l’image.

Dans un jugement rendu le 20 novembre 2018, le tribunal de grande instance de Bobigny estime que la violation du droit à la vie privée du plaignant est caractérisée et doit donner lieu à réparation.

Pour ce faire, les juges du fond s’appuient sur le procès-verbal de constat d’huissier produit par le plaignant portant sur le contenu du téléphone portable de son épouse, lequel révèle l’envoi par la défenderesse de photographies montrant son ex-amant dans son intimité, notamment une photographie de son sexe, ainsi que de captures d’écran de messages échangés entre le plaignant et la défenderesse. Le TGI observe qu’il s’agit de correspondances privées et d’images portant sur la vie sexuelle et sentimentale du plaignant et qu’il n’est pas démontré que ce dernier en aurait autorisé la diffusion à l’attention d’une tierce personne.

Les juges estiment que l’envoi de nombreux messages à la femme du plaignant lui a causé un préjudice moral en portant atteinte à son honneur. Toutefois, la relation extra-conjugale entretenue par les intéressés étant déjà connue de l’entourage du plaignant, et notamment de son épouse, antérieurement à l’envoi des messages, l’importance du préjudice subi par l’envoi desdits messages et photographies s’en trouve atténuée. Le TGI condamne en conséquence l’ex-amante à verser la somme de 800 € de dommages et intérêts.