Identification de la personne ayant qualité pour agir contre une diffamation non publique dans une société

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Dans une société, un document a été accroché sur le panneau réservé au syndicat A. de l’établissement. Cette affiche revendiquait que le comité d’entreprise (CE) de la société est soumis « au bon vouloir de certains de ses représentants qui décident seuls (sans vote) de certaines dépenses […] » et « qu’il n’y a pas eu de vote lors de la dernière réunion du CE concernant cette fameuse demande de participation ». Le syndicat B. et M. Z. ont alors assigné M. X. en diffamation non publique.

Dans un arrêt du 23 mai 2017, la cour d’appel de Rennes a tout d’abord déclaré l’action du syndicat irrecevable. Elle a en effet relevé que les propos incriminés visaient non pas le syndicat mais uniquement le CE de la société puisqu’il était reproché à ses membres de s’être dispensés des règles du vote pour décider de dépenses. Elle a donc retenu que seul le comité d’entreprise, ou les membres de celui-ci qui s’estimaient diffamés, avaient qualité pour agir en diffamation. Par conséquent, l’action exercée par le syndicat était irrecevable.

Le 11 juillet 2018, la Cour de cassation confirme le raisonnement des juges du fond. Pour cela, elle rappelle qu’il résulte de la combinaison des articles 29 alinéa 1er, 48 6° de la loi du 29 juillet 1881 et R. 621-1 du code pénal que la répression de la diffamation non publique envers un particulier ne peut être poursuivie que sur la plainte de celui qui, personnellement visé et atteint, en a été directement victime. Elle souligne également que l’article L. 2132-3 du code du travail, qui permet aux syndicats professionnels d’exercer, devant toutes les juridictions, tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant un préjudice direct ou indirect à l’intérêt collectif de la profession qu’ils représentent, ne déroge pas à ces règles spéciales qui sont d’ordre public. En l’espèce, le syndicat ne pouvait donc pas agir.

Par ailleurs, les juges du fond ont également rejeté la demande de M. Z. en signalant que son nom n’apparaissait à aucun moment dans le tract litigieux et qu’il n’était pas davantage identifiable par d’autres moyens présents dans le texte.

La Haute juridiction judiciaire casse cependant l’arrêt rendu par les juges du fond. Au visa des articles 29 alinéa 1er de la loi du 29 juillet 1881 et R. 621-1 du code pénal, elle précise que la cour d’appel aurait dû rechercher si la fonction de trésorier du comité d’entreprise exercée par M. Z. ne constituait pas une circonstance extrinsèque rendant possible son identification. Les juges du fond auraient donc dû tenir compte d’éléments autres que les seuls propos incriminés.