La condamnation d’un prévenu pour refus de prélèvement biologique n’est pas contraire au respect de son droit à la vie privée

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A l’occasion d’une manifestation non autorisée, deux fonctionnaires de police ont été victimes de jets de projectiles et de coups de la part de plusieurs individus ayant le visage dissimulé. Plusieurs personnes ont été placées en garde à vue, notamment un individu qui a refusé, au cours de cette mesure, de se soumettre aux opérations de relevés signalétiques et de prélèvement biologique destinées à permettre l’analyse et l’identification de son empreinte génétique. À l’issue de l’enquête, il a été poursuivi devant le tribunal correctionnel pour association de malfaiteurs, violences aggravées, refus de se soumettre aux opérations de relevés signalétiques, en récidive, et refus de se soumettre au prélèvement biologique destiné à l’identification de son empreinte génétique, en récidive. Le tribunal a seulement relaxé l’individu du chef d’association de malfaiteurs.

Le 8 novembre 2017, la cour d’appel de Rennes a infirmé partiellement le jugement et relaxé le prévenu du chef de refus de se soumettre au prélèvement biologique destiné à l’identification de son empreinte génétique.
Elle a énoncé que par une décision en date du 22 juin 2017 (Aycaguer c/ France), la Cour européenne des droits de l’Homme a estimé que le régime actuel de conservation des profils ADN dans le Fichier, auquel le requérant s’était opposé en refusant le prélèvement, n’offrait pas, en raison tant de sa durée que de l’absence de possibilité d’effacement, une protection suffisante à l’intéressé.
Elle a relevé qu’aucune différenciation n’était prévue en fonction de la nature et de la gravité de l’infraction et qu’elle a jugé que la condamnation pénale du requérant pour avoir refusé de se soumettre au prélèvement destiné à l’enregistrement de son profil dans le FNAEG s’analysait en une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et ne pouvait passer pour nécessaire dans une société démocratique et que partant il y avait eu violation de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme.
Elle a ajouté que, au vu de cette décision mais aussi de la nature ainsi que du degré de gravité des faits principaux reprochés au prévenu, il convient d’appliquer la jurisprudence de la CEDH et de constater que la condamnation du prévenu pour l’infraction visée à l’article 706-56, II, du code de procédure pénale serait contraire à l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme.

Le 15 janvier 2019, la Cour de cassation casse et annule l’arrêt rendu par les juges du fond.
Elle précise que le refus de prélèvement a été opposé par une personne qui n’était pas condamnée mais à l’encontre de laquelle il existait des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu’elle ait commis l’une des infractions mentionnées à l’article 706-55, de sorte qu’elle avait alors la possibilité concrète, en cas d’enregistrement de son empreinte génétique au fichier, d’en demander l’effacement.
La cour d’appel a donc violé les articles 706-54, 706-56 et R. 53-14 dudit code de procédure pénale.