QPC : délai entre la citation et la comparution devant un tribunal correctionnel en matière d’infractions de presse

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Le Conseil constitutionnel a été saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) relative à la conformité à la Constitution de l’article 54 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance du 13 septembre 1945, relatif au délai entre la citation et la comparution devant un tribunal correctionnel en matière d’infractions de presse.

Dans une décision du 24 mai 2019, le Conseil constitutionnel rappelle qu’en vertu des articles 48 et 53 de la loi du 29 juillet 1881, la poursuite des délits et contraventions commis par voie de presse peut être exercée par la partie lésée au moyen d’une citation directe.
Dans ce cas, l’article 54 précité prévoit que le délai entre la délivrance de la citation et la comparution devant la juridiction de jugement doit être de vingt jours, augmenté d’un délai de distance.
Les dispositions contestées prévoient que ce délai de distance est d’un jour par cinq myriamètres de distance, soit un jour par cinquante kilomètres, entre le lieu de résidence de la personne poursuivie et celui du tribunal devant lequel elle est citée à comparaître.

En instaurant un délai de distance, en plus de celui de vingt jours fixé pour la préparation de la défense, le législateur a entendu garantir à la partie poursuivie un temps nécessaire à son déplacement vers le lieu où elle est citée à comparaître.

La prise en compte, par l’instauration d’un délai spécifique, de la distance séparant le lieu de résidence de la personne poursuivie du lieu où elle est citée à comparaître n’est, par elle-même, pas contraire au principe d’égalité devant la justice.
Toutefois, en raison de l’étendue du territoire de la République, les modalités de détermination de ce délai définies par les dispositions contestées sont susceptibles de conduire à des délais de distance très différents. Compte tenu des moyens actuels de transport, ces différences dépassent manifestement ce qui serait nécessaire pour prendre en compte les contraintes de déplacement, et ce quelle que soit la distance séparant le lieu de résidence du prévenu de celui de sa comparution.
Dès lors, les dispositions contestées procèdent à une distinction injustifiée entre les justiciables.

Dans ces conditions, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres griefs, les mots « outre un jour par cinq myriamètres de distance » figurant au premier alinéa de l’article 54 de la loi du 29 juillet 1881, qui méconnaissant le principe d’égalité devant la justice, doivent être déclarés contraires à la Constitution.

L’abrogation immédiate des dispositions contestées entraînerait des conséquences manifestement excessives, il y a lieu donc de reporter au 31 mars 2020 la date de l’abrogation de ces dispositions.
Afin de faire cesser l’inconstitutionnalité constatée à compter de la publication de la décision, il y a lieu de juger que les citations délivrées en application de la loi du 29 juillet 1881 après cette date sont soumises aux délais de distance déterminés aux deux derniers alinéas de l’article 552 du code de procédure pénale.
La déclaration d’inconstitutionnalité ne peut être invoquée dans les instances engagées par une citation délivrée avant la publication de la présente décision.