Refus de communiquer aux Laboratoires Servier des données relatives au Médiator

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Les Laboratoires Servier a demandé à la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) la communication des données sources de deux études réalisées sous son égide relative à la spécialité du Médiator.
Par une décision du 2 février 2012, la CNAMTS a refusé la communication de ces données.
A la suite de la saisine de la Commission d’accès aux documents administratifs et de l’avis défavorable émis par celle-ci, la CNAMTS a confirmé son refus de communication par une décision implicite de rejet.

Le 15 juillet 2013, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande des Laboratoires Servier tendant à l’annulation de cette décision et à ce qu’il soit enjoint à la CNAMTS de lui communiquer ces données.

Le 30 décembre 2015, le Conseil d’Etat rejette le pourvoi de la société.
Il précise, tout d’abord, qu’il résulte de l’article 37 de la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés que « lorsque des données à caractère personnel ont également le caractère de documents administratifs, elles ne sont communicables aux tiers […] que s’il est possible d’occulter ou de disjoindre les mentions portant atteinte, notamment, à la protection de la vie privée ou au secret médical ; qu’il ne peut être accédé à une demande de communication sur le fondement de la loi du 17 juillet 1978 que si le traitement nécessaire pour rendre impossible, s’agissant de données de santé, toute identification, directe ou indirecte, de l’une quelconque des personnes concernées, y compris par recoupement avec d’autres données, n’excède pas l’occultation ou la disjonction des mentions non communicables, seule envisagée par cette loi ». 
Ainsi, la seule circonstance que les données en cause soient issues du système national d’information interrégimes de l’assurance maladie ne faisait pas, par elle-même, obstacle à ce qu’elles soient communiquées.

Par ailleurs, « la seule circonstance que la communication d’un document administratif soit de nature à affecter les intérêts d’une partie à une procédure juridictionnelle ou qu’un document ait été transmis à une juridiction dans le cadre d’une instance engagée devant elle ne fait pas obstacle à sa communication ».

Toutefois, le Conseil d’Etat précise qu’ »il revient à la personne chargée d’une mission de service public qui est sollicitée pour communiquer des documents qu’elle détient de vérifier notamment, au cas par cas et selon les circonstances de l’espèce, si leur communication risquerait d’empiéter sur les compétences et prérogatives d’une autorité judiciaire ou d’une juridiction, auxquelles il appartient seules, dans le cadre des procédures engagées devant elles et en vertu des principes et des textes qui leur sont applicables, d’assurer le respect des droits de la défense et le caractère contradictoire de la procédure ». 
En l’espèce, les juges du fond ont relevé que « l’identification des effets secondaires du Mediator, spécialité pharmaceutique contenant du benfluorex que les Laboratoires Servier avait commercialisée avant son retrait du marché, constituait un élément essentiel de la caractérisation des éléments matériels de l’infraction pour laquelle elle était ainsi poursuivie ».
En conséquence, la communication demandée était de nature à porter atteinte au déroulement d’une procédure juridictionnelle.

La requérante n’est donc pas fondée à demander l’annulation du jugement du tribunal administratif de Paris.