TUE : liberté d’expression des députés européens

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Lors de deux séances plénières du Parlement, M. X., député européen, a tenu des propos particulièrement choquants à l’égard des migrants et des femmes. Dans deux décisions, le président du Parlement a infligé des sanctions à M. X., notamment la perte de son droit à indemnité de séjour pendant une certaine durée et la suspension temporaire de sa participation à l’ensemble des activités du Parlement. Le bureau du Parlement a maintenu ces décisions. M. X. a par conséquent saisi le Tribunal de l’Union européenne (TUE) pour obtenir l’annulation de ces décisions et la réparation de ses préjudices financier et moral.

Le 31 mai 2018, le TUE annule les décisions du bureau du Parlement. Il rappelle tout d’abord l’importance de la liberté d’expression comme droit fondamental bien que celle-ci puisse être limitée dans certaines conditions.

Il souligne ensuite que les parlementaires doivent bénéficier d’une liberté d’expression accrue en raison de l’importance fondamentale que le Parlement joue dans une société démocratique. Néanmoins, leur liberté d’expression est toujours encadrée par la protection du bon ordre des activités parlementaires et la protection des droits des autres parlementaires.
Par conséquent, le TUE énonce que le règlement interne d’un parlement ne peut prévoir la possibilité de sanctionner des propos tenus par les parlementaires que dans l’hypothèse où ceux-ci portent atteinte à son fonctionnement efficace ou représentent une forme de danger sérieux pour la société, tels que des appels à la violence ou à la haine raciale.

En l’espèce, le règlement du Parlement, dans sa version applicable au premier litige, prévoyait que son président pouvait prononcer une sanction si un député troublait la séance d’une manière exceptionnellement grave ou perturbait les travaux du Parlement. Le TUE indique à ce propos que ces dispositions ne visaient que le comportement des parlementaires et non les propos, qui n’étaient donc pas susceptibles de faire l’objet d’une sanction. Bien que cette disposition ait été modifiée pour la seconde espèce visant cette fois-ci les comportements et propos, le TUE signale qu’une interprétation littérale du règlement ne permet pas de sanctionner la violence des propos en tant que telle. Il faut en effet que ces derniers soient accompangés d’une perturbation des travaux du Parlement.

Enfin, le TUE constate que les propos de M. X. n’ont pas créé un quelconque trouble lors de ces séances. Le Tribunal rejette donc l’argument du Parlement selon lequel la « perturbation » qui aurait justifié l’imposition de sanctions disciplinaires s’est manifestée hors séance, par une atteinte à sa réputation et à sa dignité en tant qu’institution.