Violation du droit à l’image et à la vie privée liée à la diffusion d’un selfie aux côtés d’un homme politique en train de dormir

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En 2015, un selfie a été publié sur les réseaux sociaux. La photographie était prise dans un avion et représentait son auteur, ainsi que, sur le siège situé devant lui, un homme politique en train de dormir, la tête renversée sur l’appui-tête de son fauteuil et la bouche entrouverte. Le selfie était accompagné du commentaire « Mettez les KO demain en allant tous voter. Pour préserver notre France fraternelle!”. L’auteur faisait référence au second tour des élections régionales.
L’homme politique a saisi le juge des référés, considérant que cette photographie prise à son insu et publiée sans son autorisation portait atteinte à sa vie privée et à son droit à l’image. Il demanda la suppression du selfie, son interdiction de diffusion, la diffusion d’un message accompagnant la mesure de retrait, la publication de la disposition dans différents magazines, ainsi que le versement d’une indemnité provisionnelle.

Le 10 février 2016, le juge des référés a considéré que ce cliché, malgré son caractère humoristique et son utilisation afin de faire passer un message politique, constitue une violation du droit à l’image du défendeur. Il a en effet été réalisé et diffusé sans son consentement. Il n’était pas non plus justifié par le sujet d’actualité politique en cause, avec lequel il ne se rattachait que de manière artificielle.
Le juge des référés a également estimé que ce cliché constitue une violation du droit à la vie privée de l’homme politique. Il s’agissait d’un moment d’intimité.
Le tribunal de grande instance de Paris, statuant en référé, a ajouté que la circonstance que l’homme politique se trouve dans un lieu public n’est pas de nature à diminuer son droit d’obtenir réparation de son préjudice moral. Elle précise qu’admettre le contraire reviendrait à considérer que les personnes célèbres ne bénéficient pas du même droit que les autres à fréquenter les lieux publics et constituerait une mesure discriminatoire.
Il a considéré donc que, puisque le selfie n’était ni dégradant, ni malveillant, il n’y avait lieu d’allouer au politicien qu’un euro symbolique d’indemnité. Il a ordonné en revanche à l’auteur de la photographie de la supprimer et lui a interdit de la publier à nouveau, sous peine d’astreinte par infraction constatée.